Si j’ai passé un mois en Chine, je n’ai pas, pour des raisons familiales, pu visiter beaucoup d’endroits différents. Mes anecdotes sont donc à prendre telles quelles, ce sont des impressions qui ne reflètent pas forcément la réalité du pays…
Le Heilongjiang est une province chinoise en partie recouverte par une immense forêt. Elle est propriété de l’état et est protégée et entretenue comme telle. Le terrain de la maison est enclavé dans cette forêt et, sur trois côtés, l’orée des arbres du domaine publique trace la frontière aussi sûrement que notre bon vieux cadastre français.
Nous avons profité de la belle journée d’hier pour aller nous promener dans les sous-bois où quelques routes, qui semblent disparaître dans les bois, desservent de petits villages. Le terrain est très sérieusement vallonné, sans que nous ayons croisé quoi que ce soit qui semble s’élever à plus de deux ou trois cents mètres. Le dénivelé était particulièrement vertigineux et je n’aurais pas aimé avoir à le traverser à pied malgré les nombreuses prises dont j’aurais pu profiter en me servant des arbres. Je me suis demandé à plusieurs reprises où pouvaient bien aboutir les routes, car les axes principaux sont des chaussées à deux voies proprement déneigées et les ornières dans le verglas témoignaient de leur usage fréquent. Nous avons pourtant roulé un bon moment avant de voir âme qui vive !
Après quelques kilomètres, le premier hameau. Une vingtaine de petites maisons jaunes aux toits bleus et aux palissades vert pâle témoignant de la double activité des forestiers : l’exploitation organisée du bois et l’attrait touristique du lieu que l’on apprécie ou non les couleurs choisit. Les principales essences sont des étendues de bouleaux dont les troncs blancs deviennent presque argentés sous les reflets de la neige.
Des sapins d’un solide vert sombre et différentes sortes de pin et de persistants, dont les plus valeureux doivent être cette sorte de cèdre rouge, complètent le tableau. Mais, ne m’en demandez pas plus, la botanique n’étant pas mon fort. J’ai clairement distingué plusieurs sortes de boisement, les zones de culture sont clairement reconnaissables par l’ordonnancement strict des arbres à plusieurs stades de leur croissance, de la pouponnière qui sera probablement replanté ailleurs plus tard à la matière première d’arbre de vingt ans ou plus. On a d’ailleurs croisé plusieurs camions remplis à ras de la cabine – et débordant sur les côtés – de troncs fraîchement coupés. D’autres parties de cette étendue boisée sont laissées aux bons soins de dame nature et progressent sans que la main de l’homme ne s’en mêle de trop près. C’est comme ça qu’est mis en valeur le coeur de la forêt primaire que nous sommes allés voir de plus près. L’âge des arbres y est alors estimé de trois modestes siècles à un bon demi-millénaire bien tassé. Leur tronc à une circonférence telle que, s’ils ne sont pas si impressionnants de prime abord, on peut s’y cacher à deux de front et ce n’est pas une image, car nous en avons fait l’expérience. Dès qu’on lève la tête on se rend compte de leur immensité et de leur vigueur, plusieurs siècles avec des nuits d’hiver à -20 °C en conservant ses aiguilles bien vertes, ce doit être ça la vraie gloire. Je suis sûr que si les Ents existent, ils ne doivent pas vivre bien loin ! Alors qu’on pourrait être au milieu de nulle part, des toilettes publiques attestent des nombreux visiteurs qui viennent jusqu’ici à la belle saison.
La plus belle promenade commence par un escalier de planche à flanc de coteaux qui dévoile tout un sentier de passerelle, long de plusieurs kilomètres, qui serpente dans la forêt. Nous nous y sommes promenés avec plaisir sans chercher à aller au bout puisque nous ne connaissions pas précisément sa longueur et que les marches enneigées étaient parfois glissantes.